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"Masculin Féminin Singuliers"
Les bouleversements, dans le Symbolique, le Réel et l’Imaginaire au XXIème siècle, comme en témoigne la clinique des parlêtres, sont tels qu’ils ont des effets sur la sexuation, sur les rapports des êtres humains à leur sexe, à la différence sexuelle et au choix d’objet d’amour et de désir.
Comment se dit-on, homme, femme aujourd’hui ?
Les médias se font l’écho du refus de cette binarité, en particulier chez les adolescents mais pas seulement. La presse en donnait récemment de nombreux témoignages (1).
La notion de genre - l’ensemble de prescriptions de l’Autre social, qui imposeraient dès l’enfance aux êtres humains des comportements en rapport avec le sexe biologique - a été depuis longtemps dénoncée comme une norme assujettissante. A cet égard la psychanalyse est, à tort, interprétée comme gardienne de cet ordre. Comment avec l’enseignement de Jacques Lacan, pouvons-nous penser le rapport au corps sexué que nous avons ? C’est toujours de l’ordre d’un devenir singulier. Ce rapport n’obéit pas au régime de la nécessité, pas de programme préétabli, mais à la contingence de la rencontre, celle d’un dire singulier, d’une scène, qui pour tel ou telle parlêtre a fait énigme. La sexualité fait « trou dans le réel… » (2). Chacune, chacun doit l’interpréter.
Lacan, dans le Séminaire Encore(3) a repensé les modes de rapport des hommes et des femmes à l’Autre du langage et au corps, avec une autre logique que la logique masculine, qui s’articule autour du phallus et de la castration. Il y a une Autre jouissance dite féminine, qui échappe à cette logique-là. Lacan, dira un an plus tard, reprenant les formules de la sexuation : « l’être sexué ne s’autorise que de lui-même. » (4)
J A. Miller, en 2012, disait ceci : « Lacan a utilisé le langage mathématique qui est le plus favorable à la science. Dans les formules de la sexuation, par exemple, il a essayé de saisir les impasses de la sexualité dans une trame de logique mathématique. Et cela a été une tentative héroïque de faire de la psychanalyse une science du réel comme l’est la logique. Mais cela ne peut se faire sans emprisonner la jouissance dans la fonction phallique, dans un symbole. Cela implique une symbolisation du réel, de se référer au binaire homme-femme, comme si les êtres vivants pouvaient être répartis si nettement, alors que nous voyons déjà, dans le réel du XXIème siècle, un désordre croissant de la sexuation. Ceci est une construction secondaire qui intervient après le choc initial du corps avec lalangue, qui constitue un réel sans loi, sans règle logique. La logique s’introduit seulement après, avec l’élucubration, le fantasme, le sujet supposé savoir et la psychanalyse. » (5)
Nous étudierons ces questions, avec les apports de la clinique du XXIème siècle.
1 N° 2838 du 28 mars 2019. « La révolution du genre ». La matinale du Monde. 11 juin 2019. Des ados « ni tout à fait filles ni tout à fait garçons »
2 Lacan Jacques. « Préface à l’éveil du printemps ». P.562. Autres Ecrits. Editions du Seuil. Paris. 2001.
3 Lacan Jacques. Livre XX. Encore. Editions du Seuil.1975.
4 Lacan Jacques. Séminaire « Les non-dupes errent ». Séminaire inédit. Leçon du 9 avril 1974.
5 Miller J-A. « Le réel au XXIème siècle. Présentation du thème du IXème Congrès de l’A.M.P. La Cause du Désir 82. P.87-94.
Date de dernière mise à jour : 25/01/2021